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70% des femmes estiment ne pas avoir reçu le même traitement que leurs frères dans la vie de famille, près de la moitié des 25-34 ans pense que c’est également le cas à l’école et 92% des vidéos pour enfants contiennent des stéréotypes genrés : ces trois chiffres issus du 6ème rapport annuel sur l’état du sexisme en France sont révélateurs des causes du sexisme persistant et des inégalités ancrées dans la société. Famille, école et numérique sont les trois incubateurs qui inoculent le sexisme aux enfants dès le plus jeune âge. Il faut donc le combattre là où il nait. C’est une des principales conclusions du rapport.
Les parents, sans s’en rendre compte, n’élèvent pas les filles et les garçons de la même manière. Deux tiers des femmes estiment avoir été éduquées différemment. Seulement 3% des hommes ont reçu des poupées et 4% des femmes des jouets voiture dans leur enfance. L’école reproduit ces schémas, avec des conséquences directes sur l’orientation : 74% des femmes n’ont jamais envisagé de carrière dans les domaines scientifiques ou techniques. L’éducation à l’égalité prévue par la loi n’est toujours pas prodiguée : deux tiers des personnes interrogées n’ont jamais suivi de séance d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle. En ligne, 75% des femmes affirment ne pas être traitées à égalité (ce que corroborent nos études des contenus les plus vus sur Instagram notamment, où 68% des vidéos véhiculent des stéréotypes assignant les femmes à la maternité). Plus grave encore, les vidéos pornographiques diffusent des contenus misogynes d’une rare violence que 64% des hommes de 25-34 ans disent imiter dans leurs relations sexuelles.
Voilà pourquoi le sexisme reste prégnant, s’aggravant même d’une année sur l’autre dans certaines catégories de population. Chez les jeunes adultes masculins, mais aussi parfois chez les femmes, on observe un retour aux valeurs traditionnelles : l’idée « qu’il est normal que les femmes s’arrêtent de travailler pour s’occuper de leurs enfants » gagne 7 points (34 %) chez les intéressées. La « résistance » masculine se fait également sentir par rapport aux évolutions de la société : 37% (+3 points) des hommes considèrent que le féminisme menace leur place. Plus d’un homme sur 5 de 25-34 ans considère normal d’avoir un salaire supérieur à sa collègue à poste égal. 70% des hommes pensent encore qu’un homme doit avoir la responsabilité financière de sa famille pour être respecté dans la société. Plus de la moitié de la population trouve encore normal ou positif qu’une femme cuisine tous les jours pour toute la famille.
Ce sexisme ambiant a bien sûr des conséquences fortes sur le ressenti des femmes : 9 femmes sur 10 déclarent avoir personnellement subi une situation sexiste. Les violences sexistes et sexuelles ne reculent pas : 37% des femmes déclarent toujours avoir vécu une situation de non-consentement, un chiffre qui grimpe à plus de 50% chez les 25-34 ans. Chez les hommes, les réflexes masculinistes persévèrent : un quart des 25-34 ans pense qu’il faut parfois être violent pour se faire respecter.
Paradoxalement, la population est de plus en plus consciente et tolère de moins en moins les violences sexistes et sexuelles. Le rapport montre bien le décalage entre cette prise de conscience et le maintien des stéréotypes qui continuent de forger les mentalités et les comportements. Il faut donc agir en adoptant un plan d’urgence comme le demande l’opinion publique : éduquer, réguler, sanctionner.
« Faisons du sexisme de l’histoire ancienne ! » : c’est le message porté par la nouvelle campagne de sensibilisation du HCE, réalisée par l’agence BETC, dans le cadre de la première journée nationale officielle de lutte contre le sexisme du 25 janvier. A retrouver sur tous vos écrans et ondes radio et sur la chaine YouTube du HCE : https://youtu.be/t9VGOb0zju4
« Je remercie France Télévisions, TF1, Radio France et RTL pour la diffusion gracieuse de notre spot de campagne. L’engagement de ces médias à large audience permettra de mieux encore sensibiliser l’opinion et les pouvoirs publics à la nécessité de lutte contre le sexisme. » - Sylvie Pierre-Brossolette, présidente du HCE.
Contact presse : Camille Yildiz, camille.yildiz@pm.gouv.fr, 06 09 14 43 06
Connu / mel
Sujet : [Diversite] 6ème état des lieux du sexisme en France - rapport du Haut Conseil à l'Égalité entre les femmes et les hommes
Date : Mon, 22 Jan 2024 10:34:17 +0100
De : FCT
Le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE) publie aujourd’hui un rapport intitulé Pornocriminalité : mettons fin à l’impunité de l’industrie pornographique. Ce document n’a de rapport que le nom. Nous alertons sur son manque d’objectivité ainsi que sur le caractère autoritaire de ses méthodes et préconisations.
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publie aujourd’hui un rapport intitulé Pornocriminalité : mettons fin à l’impunité de l’industrie pornographique. Ce document n’a de rapport que le nom. C’est en réalité un réquisitoire contre « la pornographie », envisagée comme un « système » à la racine de toutes les violences et les inégalités (trafic d’êtres humains, pédocriminalité, exploitation économique, culture du viol, harcèlement sexuel, stéréotypes sexistes et racistes, etc).
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La commission violences du HCE à l’origine de ce document, dont la direction a été confiée à Céline Piques, représentante de l’association Osez Le Féminisme, proche du Mouvement du Nid, n’a lu et auditionné que des personnes dont le présupposé de départ est que la pornographie est en soi un problème à éradiquer. Florian Vörös, chercheur spécialiste des questions de pornographie et d’éducation à la sexualité, explique dans sa lettre de démission du HCE comment il a été exclu des travaux de cette commission pour des raisons idéologiques (1). Nous constatons que des travaux essentiels pour la compréhension de ces enjeux ont été sciemment ignorés par ce rapport, notamment les recherches sur la réception des images sexuellement explicites (2), sur les conditions de travail dans la pornographie (3), sur son encadrement juridique (4) et sur les biais sexistes et LGBT-phobes des politique de censure de « la pornographie » mises en place par les plateformes numériques (5). Nous observons aussi qu’aucune actrice ou réalisatrice de vidéos sexuellement explicites n’a été auditionnée, alors qu’elles sont nombreuses à s’être mobilisées contre les violences sexistes et sexuelles, tout en alertant sur les dangers de la stigmatisation et de la criminalisation de leur activité par les politiques prohibitionnistes (6).
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L’objectivité d’un rapport se mesure à sa capacité à prendre en compte l’ensemble des points de vue. Ce n’est manifestement pas la démarche de ce réquisitoire, qui ne cherche pas à ouvrir un débat public équitable et rigoureux, fondé sur un état des lieux complet des savoirs, mais à régler ses comptes avec ses adversaires idéologiques et à imposer de force sa morale sexuelle et sa politique répressive. Par ce manque d’objectivité, le HCE contrevient à sa « mission d’assurer la concertation avec la société civile et d’animer le débat public sur les grandes orientations de la politique des droits des femmes et de l’égalité ».
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Nous nous élevons contre le dénigrement et la désinformation à laquelle s’adonne le HCE en occultant la mobilisation actuelle des actrices et des acteurs de pornographie pour la reconnaissance de leur statut d’artiste-interprète et pour des contrats de travail plus protecteurs de leurs droits et de leur santé.
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Le rapport préconise d’abord d’attribuer à la police du web (Pharos) le pouvoir d’identifier et de faire supprimer les contenus « pornocriminels » en ligne. La catégorie de « pornocriminalité » est tout aussi floue que celles de « pornographie » et d’« obscénité » inventées au XIXe siècle (7). Une telle politique conduirait de fait à l’instauration d’un délit de racolage numérique, dans un contexte où l’expression en ligne des travailleurs·euses du sexe, des femmes et des personnes LGBT fait déjà l’objet d’une censure arbitraire par les plateformes numériques (8). Le rapport préconise également d’interdire toute forme de discours positif sur le travail du sexe dans l’espace public et de transformer les séances d’éducation à la vie affective et sexuelle en espaces de propagande anti-prostitution et anti-pornographie. Le projet politique porté par le HCE est ainsi d’imposer à l’ensemble du corps social, par la restructuration des appareils répressifs et idéologiques d’État, l’idée selon laquelle la « bonne » sexualité se pratique en couple, sans argent et sans vidéo.
Le féminisme anti-pornographie n’est qu’un courant féministe parmi d’autres (9). Par son appel à la répression policière, il se rapproche des mobilisations en faveur de la pénalisation du harcèlement de rue (10). Par son refus d’écouter les premières concernées et d’imposer par la force une conception étriquée de l’émancipation des femmes, il se rapproche des mobilisations contre le hijab et l’abaya. C’est pourquoi nous préférons nous revendiquer du féminisme queer, qui lutte à la fois contre les violences patriarcales et contre les politiques autoritaires de gouvernement des corps et de restriction de l’expression publique de la sexualité.
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Béatrice Damian-Gaillard, professeure en sciences de l’information et de la communication, Université de Rennes.
Florian Vörös, maître de conférences en sciences de l’information et de la communication, Université de Lille, membre démissionnaire du HCE.
(1)Florian Vörös, « Lettre de démission du Haut conseil à l’égalité entre les hommes et les femmes », remise le 25 août 2022, publiée le 14 octobre 2022. URL : https://blogs.mediapart.fr/fvoros/blog/141022/lettre-de-demission-du-haut-conseil-legalite-entre-les-femmes-et-les-hommes
(2)Clarissa Smith, Martin Barker, Feona Attwood, « Les motifs de la consommation de pornographie », Cultures pornographiques. Anthologie des Porn Studies, Paris, Editions Amsterdam, 2015, p.249-276 ; Yaëlle Amsellem-Mainguy, Arthur Vuattoux, Les jeunes, la sexualité et internet, Paris, Les Pérégrines, 2020 ; Florian Vörös, Désirer comme un homme. Enquête sur les fantasmes et les masculinités, Paris, Éditions La Découverte, 2020 ; ainsi que la thèse de doctorat en cours de Ludivine Demol sur les usages de la pornographie par les jeunes femmes.
(3)Mathieu Trachman, Le travail pornographique. Enquête sur la production de fantasmes, Paris, La Découverte, 2013 ; Béatrice Damian-Gaillard, « L’économie politique du désir dans la presse pornographique hétérosexuelle masculine française », Questions de communication, n° 26, 2014, p. 39-54 ; Heather Berg, « Une scène n’est qu’un outil marketing. Le travail indépendant des actrices dans l’économie de la pornographie en ligne aux Etats-Unis », Réseaux, n° 237, p. 151-186.
(4)Ruwen Ogien, Penser la pornographie, Paris, PUF, 2008 ; Julie Leonhard, « Etude sur la pornographie pénalement prohibée », thèse de doctorat en droit privé et sciences criminelles, Université de Nancy, 2011.
(5)Susanna Paasonen et al., « Puritanisme sexuel et capitalisme numérique », Revue française de socio-économie, n° 25, 2020, p. 167-174.
(6)Collectif, « Pornographie et violences sexuelles et sexistes : un autre programme féministe est possible », Les Club de Mediapart, 14 octobre 2022. URL : https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/141022/pornographie-et-violences-sexuelles-et-sexistes-un-autre-programme-feministe-est-possi
(7)Le rapport occulte également les recherches historiques, notamment celles de : Annie Stora-Lamarre, L’enfer de la IIIe République. Censeurs et pornographes (1881-1914), Paris, Imago, 1990 ; Lynn Hunt, The Invention of Pornography: Obscenity and the Origins of Modernity, 1500-1800, New York, Zone Books, 1993 ; Lisa Sigel, « L’obscénité entre de mauvaises mains. Cartes postales et expansion de la pornographie en Grande-Bretagne et dans le monde atlantique, 1880-1914 », Cultures pornographiques. Anthologie des porn studies, Paris, Éditions Amsterdam, 2015, p. 197-223.
(8)Thibault Grison et al., « La modération abusive sur Twitter. Étude de cas sur l’invisibilisation des contenus LGBT et TDS en ligne », Réseaux, n° 237, 2023, p. 119-149.
(9)Cornelia Möser, Libérations sexuelles. Une histoire des pensées féministes et queer sur la sexualité, Paris, La Découverte, 2022.
(10)Collectif, « Contre la pénalisation du harcèlement de rue », Libération, 26 septembre 2017. URL : https://www.liberation.fr/debats/2017/09/26/contre-la-penalisation-du-harcelement-de-rue_1599121/
(11)Gayle Rubin, Surveiller et jouir. Anthropologie politique du sexe, Paris, Epel, 2011.